TU ACCOUCHERAS DANS LA DOULEUR
Pauline Bureau avait jusqu'à présent fait un sans-faute en abordant au travers de son théâtre des sujets d'actualité avec force et conviction, qu'il s'agisse du scandale du médiator (Mon cœur), le procès de Bobigny (Hors la loi) ou de la place des femmes dans le sport (Féminines). Alors quand elle s'attaque à la question de la GPA on se dit que le spectacle va être enrichissant. Hélas on sort de la salle déçu par un traitement maladroit de cette question de société.
Tout commence comme une belle histoire d'amour. Liz, cheffe de chantier dans des projets environnementaux, rencontre Alex, marionnettiste, un soir de neige qui bloque les vols au départ d'un aéroport en Allemagne. Le trajet en voiture va sceller leur avenir. Mais leur belle histoire marque le pas le jour où Liz fait une fausse couche tardive qui révèle qu'elle a un cancer. Pas d'autre choix que de subir une hystérectomie et de devoir faire le deuil de la maternité, à 35 ans. Mais par chance la sœur de Liz, sage-femme dans un hôpital de Californie, a une collègue qui a déjà deux enfants et qui rêve d'être mère porteuse. Alex et Liz pourront avoir cet enfant qu'ils désirent tant.
Que de maladresse dans ce conte de fées. Comme elle en a l'habitude Pauline Bureau a écrit en se basant sur des témoignages. On regrette ici l'angélisme de l'histoire. Et la simplicité du traitement. Tout se passe presque trop bien une fois le diagnostic posé et la décision de la GPA prise : pas besoin de chercher la mère porteuse, elle est là spontanément et elle a le profil idéal. Pas de problème d'argent qui ne soit réglé par un rapide coup de fil au banquier (l'achat de l'appartement attendra). Aucun problème pendant la grossesse, jusqu'à l'enfant qui a le bon goût d'attendre que ses parents débarquent de l'avion en Californie pour pointer le bout de son nez. Sans compter la miraculeuse acceptation par la grand-mère au départ si critique, et un passage assez gnangnan réunissant trois générations autour du bain du bébé.
Le beau et imposant décor concourt au sentiment de longueur qui pèse sur tout le spectacle. Près d'une heure avant d'arriver à parler de la GPA, une fin sur un monologue d'Océane, la fille de Liz et d'Alex, enfant à haut potentiel, qui part dans un discours new âge totalement hors sujet. Le lent mouvement du plateau modulaire casse empêche la fluidité du passage d'une scène à l'autre, figeant les comédiens, multipliant les noirs. La direction d'acteur s'en ressent aussi. On a souvent du mal à être en empathie avec le couple Liz / Alex tant les longueurs mettent de la distance entre le spectateur et leur histoire.
Il y a pourtant quelques beaux moments, trop rares, lorsque la poésie ou le rêve s'emparent du plateau, comme la danse de Rose enceinte, la fusion des corps des deux mères, le désir d'enfant du père.
En bref : Faux pas pour Pauline Bureau qui nous avait habitués à plus de rigueur et de profondeur dans ses créations. Reste un spectacle qui interpelle et suscite le questionnement de chacun sur la question du désir d'enfants et de la GPA.
Pour autrui, texte et mise en scène Pauline Bureau, avec Yann Burlot Martine Chevallier, Nicolas Chupin, Rebecca Finet, Sonia Floire, Camille Garcia, Maria Mc Clurg, Marie Nicolle, Anthony Roullier, Maximilien Seweryn
C'EST OU ? C'EST QUAND ?
Crédit photo @Christophe Raynaud de Lâge
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