dimanche 28 septembre 2014

INTERIEUR

LE TEMPS SUSPENDU DE REGY
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LA FORCE DU SILENCE

Ce qui frappe dès l'entrée, c'est le silence. Celui est demandé sur les affiches avant l'entrée de la salle. Et d'une manière assez surprenante le public se conforme à la demande, si ce n'est pour les chuchotements et l'éternel téléphone qui sonne et que sa propriétaire met une minute à trouver au fond de son sac.

La scène est sombre. Une ombre se dessine d'un côté de la scène. La lumière se fait lentement. L'ombre avance, lentement. Elle est double. Impressionnant silence. La femme et l'enfant gagnent le centre de la scène. La mère couche l'enfant.

La scène pourrait ne durer que 10 mn. Une jeune fille est morte. Suicide ? Accident ? Là n'est pas la question. Elle est morte. Sa famille est à la maison. C'est l'heure du coucher du plus jeune enfant. Sa mère, son père, ses soeurs l'accompagnent comme tous les soirs.

Mais le drame est là, entourant la maison de son ombre menaçante.  Dehors les villageois ramènent le corps de la défunte. Le temps est comme suspendu. Le drame est arrivé. Il est inéluctable. Mais on en retarde l'annonce aux proches. Comment leur dire ? Comment vont-ils le recevoir ?
Le temps s'étire. Les mouvements, les déplacements sont au ralenti. La parole elle-même est ralentie. Retarder autant que possible comme si le fait de ne par dire permettait de nier, comme si le fait de ne pas nommer rendait la vérité irréelle.

ENTRE OMBRE ET LUMIÈRE

5-interieur-shizuoka-juin2013ckoichimiuraLa scénographie crée deux espaces : l'intérieur et l'extérieur. L'intérieur de la maison, l'intérieur des êtres. L'extérieur de la maison, la dune, le lieu de l'accident, les paysans extérieurs à cette famille et en même temps si proches,. La lumière et l'ombre séparent les deux d'une fine ligne qui ne sera franchie que lorsqu'il ne sera plus possible de retarder l'annonce. Et dès qu'elle sera franchi par le messager il sera impossible de revenir en arrière.

D'un côté la famille vit ses derniers instants de bonheur, sans en être consciente. Tel l'enfant innocent dans son âge et dans son sommeil la maison semble le refuge d'un temps qui jamais plus ne sera. Ce silence qui se fait pour permettre à l'enfant de s'endormir paisiblement se fait de plus en plus lourd, comme leurs pas. Angoissant.

La parole est extérieure.Elle est l’attribut de ceux qui savent, de ceux qui sont contraints malgré eux d'être les porteurs du malheur. Les mots sortent, comme hachurés, déliés, étirés, comme une langue elle-même ankylosée par la douleur de dire et la douleur d'entendre

UNE LENTE MÉDITATION

On peut ne pas aimer ce théâtre statique, intellectuel. Je ne connaissait pas l'oeuvre de Claude REGY.  Je ne suis non plus parfaitement à l'aise avec les règles qui régissent la culture japonaise.C'est donc avec un œil neuf que j'abordai ce spectacle. Mon manque de référence sur ce type de spectacle ne m'autorise pas à faire des comparaisons. J'en resterai donc, comme toujours, à mes sensations, à mon ressent.

Si certains passage m'ont paru traîner en longueur, je suis admirative du travail de mise en scène et en lumière que je perçois comme le fruit d'une longue réflexion et de la rencontre entre deux univers qui étaient voués à se compléter. Je suis médusée par la performance des comédiens. Le rythme des déplacement, les voix qui semblent hésitantes, elles mêmes déchirées par ce temps, le japonais que je ne connais pas me semblant parfois des onomatopées qui n'avaient rien d'incongrus puisqu'ils étaient l'expression d'une douleur.

En bref : une performance. Une méditation sur la mort et son accetpation. Un moment intense. La force du silence


C'EST OU ? C'EST QUAND ?
C'était du 9 au 27 septembre à la Maison de la Culture du Japon à Paris 15
RER Bir Hakeim / Champs de Mars - Ligne 6 Bir Hakeim



 Vu le 27 septembre 2014 - MCJP
Crédit photos Scène de « Intérieur » (Koichi Miura)

jeudi 25 septembre 2014

JE NE SERAI PLUS JAMAIS VIEILLE

UNE FEMME SE LIBÈRE

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UNE FEMME BRISÉE PAR LA VOLONTÉ D'UN HOMME

Elle s'appelle Adèle. Elle est assise dans un rocking-chair, enroulée dans sa robe de chambre rouge sang. "Je suis fatiguée" dit-elle pour justifier son apathie.  Elle était une architecte brillante, avec des projets de transformation d'une prison, mais heureusement Guillaume lui a ouvert les yeux et lui a montré que son projet ne tenait pas la route. Guillaume a su lui faire comprendre qu'il lui fallait faire une pause. Guillaume qui veille sur elle, prend soin d'elle. Guillaume, son ange gardien. Et puis il y a Luba qui vient tous les jours nettoyer sa crasse, Luba et son accent , Luba, son souffre-douleur.

Luba, le témoin de cette lente et longue descente aux enfers. Petit à petit Adèle va nous dévoiler la raison de sa fatigue et nous révéler la vraie nature de Guillaume. Il n'est pas seulement l'associé qui à force de harcèlement moral l'a écartée de son propre cabinet, il est aussi le mari qui brutalise sa femme.

BOULEVERSANTE - UNE VIOLENCE TÉTANISANTE

Christine CITTI livre une interprétation bouleversante de cette femme victime de l'engrenage malsain dans lequel l'a entraînée l'homme qu'elle (pense) aimer et soit disant aimant. Ce qui est débord décrit comme un harcèlement moral, gangrène insidieuse du monde du travail, se double ici du harcèlement moral et physique au sein d'un couple. La violence conjugale qui se cache derrière le rideau des convenances sociales, celle qui tue plus de 170 femmes en France chaque année, celle qu'1 femme sur 10 dit subir au sein de son couple, celle qui transforme l'acte d'amour en viol répété et légitimé. Cette violence montrée ici dans toute son horreur, son ignominie. Une violence tétanisante, tant pour Adèle, la victime, que pour nous, spectateurs, qui assistons impuissants à son récit.

PLUS DURE SERA LA CHUTE

Le récit d'une lente déshumanisation, d'une perte d'identité, d'une perte du respect de soi-même. Adèle, femme bafouée par la volonté d'un être que l'on ne peut qualifier d'homme. Adèle, femme brillante, belle, elle dont le métier est de réhabiliter, de transformer, de reconstruire, elle qui évolue dans un milieu social privilégié, réduite à un être battu, dénigré, nié, qui se débat, tremble, impuissant à réagir, que l'on a envie de secouer pour la forcer à sortir de cet état second, de son statut de victime.

Non Adèle n'est pas vieille. Non Adèle ne doit pas être réduite à cette robe de chambre rouge sang et à ses chausson de mamie. Adèle doit redevenir cette femme en robe noire et élégante, chaussant ses talons hauts. Cette tenue dans laquelle elle est vraiment elle et pas seulement pour faire plaisir à Guillaume lors des dîners mondains avec leurs amis, ses amis.

Car nous n'avons aucune compassion pour son bourreau, Guillaume, le gentil tortionnaire. Qui pourrait croire que ce homme si charmant et charmeur pourrait commettre chaque soir sur cette épouse qu'il valorise en public un viol conjugal abjecte, ahurissant, scandalisant,ignoble.

Et puis il y a Luba. Qui est-elle ? Femme de ménage souffre-douleur ? Victime qui s'est rebellée ? Sursaut de la voix intérieure d'Adèle qui la pousse à se relever, à se redresser, à chausser ses chaussures de femme et non plus ses chaussons de mamie ? Luba, incarnation de l'impulsion externe qui donnera à Adèle le courage de remettre un pied devant l'autre pour croire à nouveau que le bonheur est possible ailleurs.

L'enfermement dans lequel Adèle est retenue prisonnière est renforcé par la scénographie : deux panneaux qui réduisent l'espace de jeu à l'envergure des bras. Le fauteuil à bascule, celui qui berce les squelettes fatigués de vieilles femmes, celui qui permet à la jeune mère de bercer confortablement son enfant. Refuge sécurisant qui devient instrument de l'enfermement physique et psychologique. Et pour tous accessoires une paire de chaussons, une robe de chambre, une petite robe noire, des chaussures élégantes.


UN TEXTE FORT QUI DENONCE

Un moment d'une grande intensité grâce aux extraordinaires qualités de jeu de Christine CITTI qui utilise une large palette d'émotion pour nous faire le récit de cette vie qui ne sera pas brisée, de cette révolte.

La mise en scène de MARTINELLI est épurée, oppressante, donne à penser l'état d'esprit dans lequel cette femme est enfermée, les murs qui se sont dressés autour d'elle, proches, réels ou imaginaires.

Un spectacle à voir parce qu'il dérange, parce qu'il porte la voix de toutes celles qui subissent en silence tant elles sont persuadées que personne ne croira en leur statut de victime. Parce qu'il démontre les mécanismes du harcèlement. Parce qu'il faut pouvoir les reconnaître autour de soi et en soi. Car à un degré ou un autre nul n'est entièrement à l'abri, ni dans son couple, ni dans son univers professionnels, tout aussi fort peut-on se croire.


PARIS DES FEMMES


"Je ne serai plus jamais vieille" est née lorsque Anne ROTENBERG, Michèle FITOUSSI et Véronique OLMI m'ont invitée au Festival du "Paris des Femmes" en janvier 2014. J'ai tout de suite eu envie d'aborder une problématique souterraine qui pourtant touche de plus en plus de femmes : le harcèlement moral. Je voulais que ce texte soit autant une prise de conscience qu'un remerciement à la vie, aux autres rencontres, qui vous donnent à nouveau la lumière. Fabienne Périneau

Nous connaissons tous des Adèle ou des Lubas. Que se passe-t-il derrière les rideaux tirés,  les portes fermées ? Fabienne PERINNEAU tire les rideaux, ouvre les portes. Christine CITTI

POUR EN SAVOIR PLUS
Allez sur la page facebook de la pièce en cliquant ICI

En bref : Un texte dur qu'il faut entendre dans toute sa force et sa vérité, portée par Christine CITTI, remarquable comédienne qui est tout à tour sensible, forte, fragile, femme perdue, femme prédatrice, femme fragile, femme puissante. Pour ouvrir les yeux.

C'EST OU ? C'EST QUAND ?
36 Rue des Mathurins 75009 PARIS
Métro Madeleine, Saint Lazare


Du mardi au samedi à 21h

Matinée le samedi à 17h
Durée : 1h

Crédit photo @Pascal Victor

Vu le 12/09/14 - Théâtre des Mathurins

mardi 23 septembre 2014

LES CARTES DU POUVOIR

SONDAGES, SEXE, MENSONGES ET TRAHISONS

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LES JEUX SONT FAITS

Stephen BELLAMY (Raphaël PERDONNAZ) est un jeune attaché de presse talentueux. A 25 ans il a déjà plusieurs campagnes à son actif et travaille avec son mentor Paul ZARA sur la campagne des primaires du sénateur MORRIS. Alors que tout lui sourit professionnellement sa fiancé le plaque. Il va apprendre qu'il n'est pas si facile de naviguer dans les eaux troubles de la politique américaine.

Écrit par Beau WILLIMON, scénariste de la série "HOUSE OF CARDS", la pièce est remarquablement adaptée par Ladislas CHOLLAT, Francis LOMBRAIL, et Anne JEANVOINE et nous plonge au cœur d'un monde où tous les coups sont permis tant que l'on ne se fait pas prendre.


Steve et Paul sont sincères. Ils croient en la victoire de leur champion, en ses idées et idéaux. Les sondages sont là pour les réconforter. La victoire est à portée de main. Naviguant entre journalistes en mal de scoop, stagiaire homme ou  femme en quête d'une occasion pour se mettre en avant, et parmi les vieux loups de la communication politique Steve le manipulateur pourrait être pris à son propre jeu à cause de ce petit brin d'arrogance que lui donne sa progression fulgurante et la confiance de ZARA;


UN THRILLER POLITIQUE ET PSYCHOLOGIQUE

Tous les ingrédients sont réunis pour faire de ce spectacle une des réussites de la saison. L'histoire se déroule comme un thriller et tient le spectateur en haleine jusqu'à la dernière scène. La scénographie est sobre dans les tons, moderne et très cinétique et cinématographique dans la forme. Les espaces se succèdent avec fluidité. L'utilisation de la vidéo donne vie et profondeur au fond de scène, avec une mise en lumière équilibrée, jamais trop vive, jamais trop sombre, un brin doucereuse.

La mise en scène de Ladislas CHALLOT est vive, intelligente, dynamique, incisive, énergique. Elle restitue avec réalisme l'ambiance fiévreuse d'une campagne dont les enjeux sont importants, où le moindre détail pourrait tout remettre en cause, au cours de laquelle il faut pouvoir réagir au quart de seconde, être constamment sur le qui-vive, ne jamais se laisser surprendre et lorsque cela arrive ne pas montrer sa surprise.



La distribution est parfaite. Chaque rôle est tenu avec justesse et crédibilité. Raphaël PERSONNAZ est remarquable dans le rôle de ce jeune homme qui se retrouve pris dans un engrenage qu'il croit contrôler mais qui va se faire piéger comme un novice. Steven est rempli d'admiration pour son mentor et directeur de campagne Paul ZARA (Thierry FREMONT).L'élève veut dépasser le maître mais n'a pas attendu que toutes les cartes soient distribuées. Le jeune comédien développee toute une palette d'émotions. Thierry FREMONT, qui n'a plus à démontrer ses qualité de grand comédien, oppose à ce jeune chien un peu fou un personnage rusé mais intègre et au calme relativisant et sûr de lui. Elodie NAVARRE, dont j'ai un souvenir ému dans SUNDERLAND et qui jouait une belle Célimène cet été à Avignon, donne à la journaliste en quête de scoop la dose de cynisme et de séduction nécessaire. Roxanne DURAND, que je n'ai pas eu le plaisir d'applaudir dans "Anne Franck" aux côtés de Francis HUSTER, crée une jeune femme sensible et intelligente, une personnalité plus complexe que la stagiaire aveuglée par l'homme de pouvoir. Une future très grande comédienne.

Les personnages secondaires sont tout aussi réussis : Francis LOMBRAIL, le directeur de campagne adverse plus retord qu'un renard, Adel DJEMAI le serveur idéaliste, Jeoffrey BOURDENNET en journaliste et surtout Julien PERSONNAZ, le jeune loup de la communication qui cache sous ses airs timides un redoutable arrivisme et une mordante soif de pouvoir.

Nul besoin de connaître la politique américaine pour se plonger dans ce thriller. Les couloirs de certaines entreprises montrent beaucoup de ressemblances avec certaines situations. Corruption, sexe, mensonges, trahison, tout est bon pour faire plonger l'adversaire. Et ce qui est le plus intéressant est sans nul doute l'évolution des personnalités, des comportements, lorsque les masques se lève soit dans la victoire, soit dans la défaite.

En bref : ne manquez pas ce très beau moment de théâtre. Un thriller politique d'une grande qualité. Des comédiens excellents. Un must de la saison


C'EST OU ? C'EST QUAND ?
78 bis boulevard des Batignoles 75017 PARIS
Métro : Rome


Du mardi au samedi à 21h

Matinée samedi à 15h30 et dimanche à 18h
Réservation 01 43 87 23 23 
Durée : 1h50

Crédit photo : @Lot
Vu le 13 septembre 2014 - Théâtre Hébertot

CHALLENGE THEATRE 2014 - BLOG LECTURE SPECTACLE D'EIMELLE

dimanche 21 septembre 2014

LES CHATOUILLES (la danse de la colère)

LA RÉSILIENCE PAR LA DANSE
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"PETITE FILLE, TU TE BALANCES QUAND TU DANSES..." *

Le 15 septembre 2014 restera longtemps dans ma mémoire. Mais si pour moi et pour tout le public du Théâtre Antoine l'émotion fut intense ce soir-là, que dire de celle qu'a du ressentir Andréa BESCOND. Ce soir tous se sont levés spontanément pour ovationner la comédienne-danseuse ou danseuse-comédienne, sa performance et son histoire. L'histoire d'une souffrance indicible, d'un vie qui aurait pu être gâchée et que la danse a sauvée, l'histoire d'une résilience.

Cette émotion je l'ai retrouvée intacte et toujours aussi intense en ce 14 janvier 2016 lors de la première de la programmation parisienne. Une date et un rendez-vous qu'il m'était impossible de manquer. La petite salle du Petit Montparnasse est l'écrin idéal pour ce spectacle intime. Une représentation toute aussi forte. Chaque soir la salle salue debout l'immense talent d'Andréa BESCOND.

Odette à 8 ans. Comme toutes les enfants elle aime rire, dessiner, jouer à la poupée. Elle fait confiance aux adultes de son entourage. Alors pourquoi se méfier de Gilbert, cet homme qu'elle connait bien puisque c'est un ami de confiance de ses parents, pourquoi refuser de jouer à faire des chatouilles ? Parce que cela doit rester un secret entre eux deux, Odette va subir les pulsions du pédophile et les taire à tous. Comment pourraient-il comprendre ce qu'ils ne veulent pas entendre ?


Elle a la trentaine quand nous la retrouvons chez le psy qu'elle a accepté de voir en compagnie de sa mère. Une séance pendant laquelle Odette nous raconte ses souvenirs d'enfant abusée, niée dans son être le plus intime, d'adolescente à la dérive, de jeune adulte qui va reconstruire sa vie.

* extrait de "Petite fille" de Alvina LANSELLE, chanson écrite pour Andréa BESCOND. Extrait en cliquant ICI

"ODETTE, COMME LE CYGNE BLANC"

Dans son malheur Odette à un espoir, un atout : la danse

Élève douée et repérée par son professeur dès l'enfance elle deviendra danseuse, rentrera au conservatoire, fera le tour du monde dans l'univers des comédies musicales. Un talent écrit dans son prénom : Odette, comme le cygne blanc du Lac des Cygnes !

Dans ce spectacle  mis en scène par Eric METAYER, qui mêle danse et comédie Andréa BESCOND fait revivre seule en scène ceux qui ont marqué la vie d'Odette. Tous sont caricaturés et l'humour n'en fait que plus ressortir tout le tragique de cette histoire.

On rit devant cette galerie de personnage : de ce professeur de danse qui peine à se faire entendre de ses élèves turbulents, de la maladresse de ce policier qui va enfin avoir la possibilité de coincer un salaud et ne réalise pas qu'il est en train de nier la douleur de la victime, de ce père absent même quand il est présent, de ce chorégraphe contemporain, de cet ami paumé et de sa casquette de rappeur, de cette mère qui nie l'histoire de sa fille pour ne pas reconnaître sa propre responsabilité. Nombreux sont les mécanismes du rire, et ici il éclate parce que quelque chose se brise en nous.

Sans jamais plonger dans le piège du pathos ni de la caricature exagérée Andréa BESCOND témoigne avec pudeur et extrême sensibilité d'une histoire dont on ne peut croire qu'elle ne soit pas en partie autobiographique. Elle nous livre le long chemin parcouru par Odette, de la chambre d'enfant qui abritait ces "chatouilles" à la salle d'audience où se tint le procès qu'elle à la courage d'intenter à son bourreau, contre l'incrédulité et les doutes de son entourage. Ce procès ou éclate sa danse de la colère, corps brisé, désarticulé, qui exprime ce que les mots sont incapables de décrire, ce que le rire et l'humour n'arrivent plus à évacuer.


UN TRIOMPHE 

Le spectacle a été créé à Avignon, au Théâtre du Chêne Noir, dans le Off 2014. Malgré le bon bouche à oreille je ne l'avais pas retenu, par peur du sujet. Si le succès a été au rendez-vous dès l'été, c'est parce que Jean-Marc DUMONTET et Laurent RUQUIER ont eut un coup de cœur pour "LES CHATOUILLES" qu'à pu avoir lieu cette soirée exceptionnelle de septembre 2014 à laquelle j'ai la chance d'avoir pu assister. Il y avait ce soir-là quelque chose de spécial, d'unique, une bienveillance unanime et spontanée. Une émotion si forte, si authentique qu'il m'est encore difficile de trouver les mots pour l'exprimer.

Après ce showcase renversant j'écrivais "Alors il ne me reste plus qu'à souhaiter une seule chose : que LES CHATOUILLES trouvent rapidement une salle pour accueillir Andréa BESCOND et permettre à son talent, à ses mots et à sa danse d'être entendu par le plus grand nombre". C'est chose faite aujourd'hui, en janvier 2016, et je ne peux que vous encourager à réserver rapidement votre place pour ce magnifique spectacle. Un choc comme on n'en ressent que rarement.


UN PARTENARIAT AVEC LA VOIX DE L'ENFANT

Parce que l'actualité ne cesse de relater des situations d'enfants en souffrance, victimes de violences sexuelles, de maltraitances physiques ou psychologiques, et qu'il reste un long chemin à parcourir avant une vraie prise de conscience, parce qu'il ne faut jamais renoncer et que la résilience est possible, le spectacle "Les Chatouilles ou la danse de la colère" fonctionne en partenariat avec LA VOIX DE L'ENFANT dont vous pouvez découvrir les actions en cliquant ICI


En bref : Un moment d'une intensité rare. Une performance époustouflante. Une émotion authentique. BOULEVERSANT.




De et avec Andréa BESCOND
Mise en scène : Eric METAYER
Lumière : Jean-Yves de SAINT FUSCIEN
Son : Vincent LUSTAUD

C'EST OU ? C'EST QUAND ?
31 Rue de la Gaïté 75014 PARIS
Métro : Gaïté / Edgar Quinet / Montparnasse


C'était le 15 septembre 2014
Théâtre ANTOINE
14 Boulevard de Strasbourg 75010 PARIS

Et j'espère très rapidement mentionner ici les prochaines dates à Paris et ailleurs.
A suivre....

Mise à jour du 20/06/2015
Mise à jour du 16/01/2016

Vu le 14/09/2014 et le 14/01/2016

ET S'IL FALLAIT EN GARDER 10 ? #CHALLENGE

UN CHALLENGE IMAGINE PAR Miss EMELLE VA AU THÉÂTRE


Voici ce que Miss EMELLE écrivait le 13 septembre 2014 sur son blog Miss Emelle va au théâtre

"Il y a une semaine, je me suis amusée à participer à une sorte de jeu/défi sur Facebook, qui consistait à citer 10 livres qu'on a lus et qui nous ont marqué. On pouvait ensuite proposer à des amis d'en faire autant. Certaines réponses (reprenant aussi des pièces de théâtre) m'ont donné une idée: et si je devais citer 10 pièces de théâtre que j'ai vues et qui m'ont marquée, lesquelles choisirais-je?"

Et comme sur twitter je l'ai encouragée je n'ai pas été surprise qu'elle me mette au défi de fouiller dans ma mémoire 



Comment parler des 10 pièces qui m'ont le plus marquée ? Comment les choisir ? Tout comme @eimelle c'est dans l'ordre dans lequel ces souvenirs ont surgit de ma mémoire que je vais vous les livrer. Ces 10 spectacles n'auront pas révolutionné le théâtre mais ils se sont imprimés dans mes souvenirs et dans mon coeur de spectatrice et sont à l'origine de mon amour pour le spectacle vivant.


  • LES FOURBERIES DE SCAPIN - MOLIÈRE - Théâtre Montansier - Versailles - 19xx

Mon dieu, une représentation du siècle dernier ! Aussi loin qu'il m'en souvienne il me semble bien que c'était la première fois que j'allais au théâtre, et pas n'importe lequel. C'était une sortie scolaire alors que j'étais en 6ème. Honnêtement je n'ai aucun souvenir de la distribution. Mais cette première rencontre avec le théâtre, dans un si bel écrin, a marqué mon esprit pour toujours. Si beaucoup de mes congénères collégiens "snobaient" ou méprisaient cette sortie imposée par l'école moi j'y pris un réel plaisir. Dans la foulée je commençais le théâtre amateur. Il aura fallu en attendre des années avant de pouvoir devenir une spectatrice assidue. Mais c'est une autre histoire. 


  • ON NE BADINE PAS AVEC L'AMOUR - Alfred de Musset - Comédie Française / Vieux Colombier - 2011


C'est la première pièce dans laquelle j'ai joué. Elle est peu montée finalement aussi lorsque je l'ai vue dans le programme de la Comédie Française en 2011 je ne pouvais pas ne pas y aller, avec toutefois la crainte d'être déçue tant mes attentes étaient grandes. J'y ai retrouvé les émotions de la première lecture, les répliques qui s'inscrivaient instinctivement sur mes lèvres. Un bonheur avec notamment Loïc CORBERY en Perdican désespéré et rageur, et Danièle LEBRUN magnifique Dame PLUCHE. Si un jour je décidais de me faire auteur et de tenter d'adapter un texte ce serait celui-là car il reste mon texte préféré (mais il m'en reste tant à lire et à découvrir).



  • DES SOURIS ET DES HOMMES - Mise en scène de Jean-Philippe EVARISTE et Philippe IVANCIC - Théâtre du Petit Saint Martin - 2011


Ce spectacle a été créé en 2002, à une époque où je m'étais éloignée des salles de théâtre. Ce n'est que lors de sa troisième tournée lors de la saison 2010/2011 que je l'ai découverte au Théâtre du Petit Saint Martin. J'aime beaucoup l'oeuvre de STEINBECK et l'interprétation hallucinante de Philippe IVANCIC du rôle de Lenny m'a bouleversée jusqu'aux larmes.



  • ILLUMINATION(s) - Compagnie MADANI - Théâtre Les Halles - Avignon 2013

C'est par esprit de clocher que j'avais sélectionné ce spectacle dans la programmation du Off 2013. Tout d'abord parce qu'il s'agit d'une création par une compagnie de ma lointaine banlieue, mais aussi parce que Ahmed MADANI avait pour cela fait appel à des amateurs issus de ce quartier dit "difficile" du Val Fourré à Mantes la Jolie, près duquel j'ai grandi et non loin duquel je vis toujours aujourd'hui. Le spectacle a été un choc. D'une part du fait de sa construction et de son propos factuel et non pas moralisateur ni accusateur, mais aussi parce que j'ai été bluffée par la qualité du travail de ces 9 amateurs n'ayant aucune formation de comédien et dont la prestation surpassait de nombreux professionnels. Je l'ai vu 3 fois avec la même émotion. (Il continue à tourner avec de nouvelles dates en 2014 et 2015)


  • LE PORTEUR D'HISTOIRE - Alexis MICHALIK - Compagnie Los Figaros - Théâtre 13 - Paris - 2011
Je l'avais sélectionnée dans mon programme du Off 2011 car une amie avait adoré "La mégère à peu près apprivoisée" (que je n'ai jamais vue). Mais c'était complet tous les jours. Alors quand je l'ai vue à l'affiche du Théâtre 13 à Paris j'ai foncé. Et je suis tombée sous le charme de ce récit épique, de cette quête littéraire de l'écriture d'Alexis MICHALIK qui m'emporte à chaque fois dans un tourbillon magique. A peine sortie de la salle je voulais déjà y retourner. Depuis je l'ai vue trois fois, avec des distributions différentes. La troupe est d'une richesse extraordinaire et j'adore partager ce spectacle avec à chaque fois de nouvelles personnes.



  • ACAPULCO MADAME - Yves JAMIAQUE - Théâtre de la Michodière - 1978

Dans cette comédie de boulevard une mère de famille reçoit un appel d'un jeune homme qui lui donne rendez-vous à l'aéroport un jour donné, pour s'envoler pour Acapulco. Une erreur. Troublée elle va remettre en question sa vie bien ordonnée, confortable, cet homme qui est son mari et qui ne la regarde plus, ces enfants qui ont fait d'elle leur bonne. Partira-t-elle suivre un inconnu pour avoir le sentiment de revivre ? . Un comédie qui pose la question du rôle de la femme dans le couple et que ne me semble pas démodée. Les rôles principaux étaient tenus par Micheline BOUDET et Philippe NICAUD. Dans mon esprit cette pièce vue au théâtre de la Michodière, mais je n'en mettrai pas ma main à couper. Ce qui est sûr c'est qu'elle est associée à la mythique émission "Au théâtre ce soir", incontournable rendez-vous télévision du samedi soir, à une époque où la télévision ne comptait que deux chaines, l'époque des Jacqueline Maillant, des Maria Pacôme, des Jean Le Poulain.


  • D'ARTAGNAN - mes Jerôme SAVARY - Théâtre National de Chaillot - 1988
Pourquoi n'existe-t-il aucune captation de ce spectacle ? J'en garde le souvenir du plus gros éclat de rire que j´ai jamais eu au théâtre.  La scène du bal à Londres qui ouvrait la deuxième partie était tellement drôle qu'il m'a fallu de longues minutes pour me remettre des crampes de ventre générées par mon fou rire. Un spectacle d'une drôlerie incroyable, des duels à l'épée ciselés, du grand spectacle. Je crois bien que je suis tombée amoureuse de Christophe MALAVOY irrésistible d'ARTAGNAN. La mise en scène de Jérôme SAVARY donnait un nouveau relief à l'oeuvre de DUMAS. Un souvenir impérissable d'un théâtre vif, énergique, lumineux, magique. Du grand spectacle.


  • ANDROMAQUE - Jean RACINE - mes Muriel MAYETTE-HOLZ - Comédie Française - 2010


Racine. La tragédie grecque. La salle Richelieu. C'est toujours un challenge de porter à la scène un tel classique. La pièce est longue, le premier acte laborieux avec l'exposé des personnages et de enjeux. Mais il y avait une grâce infinie dans cette mise en scène. Le décor à la fois sobre et sophistiqué, la mise en lumière, la lenteur d'un temps écrasé par le drame qui se joue, et une distribution éclatante dominée par Eric RUF magistral. Quelle voix, quelle prestance. Un souvenir extraordinaire et intense.


  • HOTEL DES DEUX MONDES - Eric Emmanuel SCHMITT - mes Daniel ROUSSEL - Théâtre Marigny - 1999


Une pièce banale. Sommes nous dans un hôtel ? un hôpital ? Cinq personnages, se retrouvent dans ce lieu de passage. Aucun ne sait comment il est arrivé, combien de temps il restera, vers quoi il repartira. Au fond un ascenseur. Dans cet endroit insolite les différentes couches de la société se croisent, Julien rencontre Laura et pour tous dans cette atmosphère étrange une nouvelle vérité  se fait. J'aime beaucoup l'écriture d'Eric-Emmanuel SCHMITT. Ici il pose des questions fondamentales sur la vie, la mort, l'amour. Un texte d'une grande sensibilité qui m'a beaucoup touchée, que je relis de temps en temps. Et une distribution extraordinaire : Rufus, Catherine ARDITI, Bernard DHERAN, Anne CONSIGNY. Une grande émotion. 




  • LES CHATOUILLES - d'Andréa BESCOND - mes Ales METAYER - Théâtre Antoine - 2014

Parce que ce spectacle est encore tout frais dans ma tête puisque je l'ai vu la semaine dernière, et c'est ce qui m'a fait hésiter à le mettre sur cette liste. Mais l'émotion était si intense que je pense que dans 10 ans il restera comme l'un des 10 specpacles qui m'auront le plus marquée. L'énergie d'Andréa BESCOND, son double talent de danseuse et de comédienne, ce témoignage courageux, la touche d'humour qui permet de dénoncer sans jamais tomber dans le pathos. Il y avait une atmosphère unique ce soir de septembre. La salle qui se lève et applaudit à tout rompre pendant de longues minutes ce petit bout de femme qui vient de nous raconter sa résilience par la danse. Une émotion d'une intensité rare. Je suis sortie bouleversée et boostée par cette leçon de vie.



Et parce que le challenge est de n'en citer que 10 je vais en rester là. Le choix a été difficile. Parce qu'il faut se limiter au théâtre j'ai éliminé les autres formes de spectacle vivant comme le cirque.  J'ai hésité longtemps. Il y a tant d'émotions, tant de souvenirs, tant de beaux moments que le fait de n'en retenir que 10 donne l'impression d'être injuste vis-à-vis de ceux qui ne sont pas cités. Je pourrais me replonger dans mes souvenirs pendant encore des jours et des jours et de nouveaux souvenirs reviendraient à la surface, éclipsant les uns ou les autres. Mais à un moment il faut arrêter et se lancer. Et il y a tout ceux à venir qui viendront supplanter tel ou tel.

Merci à Miss EMELLE pour cette belle idée. Je passe le relais à un(e) autre amoureux (se) du théâtre (et là aussi pas facile de choisir). J'espère que ce challenge vivra longtemps.

Le Théâtre Côté Coeur
Septembre 2014


Et pour retrouver la liste de Emelle : http://missemellevaautheatre.over-blog.com/2014/09/10-plays-challenge.html


lundi 15 septembre 2014

CHÈRE ELENA

OÙ SONT NOS ILLUSIONS PERDUES ?

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JOYEUX ANNIVERSAIRE !


Lorsque Elena ouvre la porte et se retrouve face à quatre de ses élèves, comment ne pourrait-elle ne pas être touchée par leur marque d'affection à son encontre. Ils viennent à l'improviste lui offrir des fleurs et un cadeau pour son anniversaire. Cette "Chère Elena Sergueievna" : la meilleure des professeurs de maths. Plus qu'un professeur, presque une mère pour ces jeunes qui vivent leurs dernières heures d’insouciance de lycéens avant de se lancer dans une nouvelle vie, celle de l'université qui fera d'eux l'élite de la Nation ou les futurs bâtisseurs du pays.

Mais rapidement les sourires se figent et les masques des gentils élèves bien élevés disparaissent pour faire place à leur vraie nature. Commence pour tous une nuit dont aucun ne sortira indemne, pas même le public.

PEINTURE D'UNE SOCIÉTÉ EN TRANSITION


Créée en 1981 en Estonie la pièce fut interdite en Russie de 1983 à 1987 pour son côté subversif. Ludmilla RAZOUMOSKAIA y dresse le portrait d'une société en transition. Face à l’intègre Elena se dresse une jeunesse qui remet en cause les valeurs morales de ses aînés. Celle qui toute sa vie a lutté pour des idéaux, qui a choisi l'enseignement pour transmettre ses valeurs avec amour et passion, voit en quelques heures s'écrouler le monde pour lequel elle s'est battue.

À l'aube de leur vie d'adulte ces quatre lycéens ont déjà tout vécu, ou tout du moins le pensent-ils. Et surtout ils n'ont plus foi dans ces valeurs qui leur ont été enseignées : le travail, le respect, la lutte pour un avenir meilleur. Nés après la chute du mur de Berlin ils ne rêvent que d'argent facile et de plaisirs illusoires.

Mais leur Chère Elena se dresse entre eux et leur avenir. Ces derniers devoirs ratés pourraient leur fermer les portes de cette vie. Elle seule peut les sauver en leur donnant la clé du coffre qui renferme les précieuses copies.

Au fil de la nuit c'est une descente aux enfers qui va tous les entraîner. Un affrontement qui va crescendo jusqu'à engendrer une violence insoutenable.

La pièce est écrite alors que le pays traverse une crise économique doublée d'une crise morale. Que reste-t-il des idéaux de 1917 ? Va-t-on toujours vers un monde meilleur ? Comment en est-on arrivé à ce que de jeunes lycéens qui devraient être animés d'idéalisme puissent être aussi cyniques, aussi conscients des bassesses et des compromis des hommes et aussi habiles à les utiliser ?

MYRIAM BOYER ENTOURÉE DE JEUNES TALENTS PROMETTEURS

Le talent de Myriam BOYER n'est plus à démontrer. Elle incarne ici une Elena idéaliste qui face au chantage et à la demande de trahison qui lui est faite se trouve emplie du complexe d'Antigone : "c'est quand quelqu'un érige en principe sa vision idéaliste du réel" dit VOLODIA. Femme simple, combattante, généreuse et aimante, idéaliste, elle est tout d'abord stupéfaite, interloquée par la demande de ses élèves. Incapable d'y croire elle les voit évoluer, rôder, user de tous les artifices de la manipulation, de la séduction, de la menace, pour la faire craquer. Et si à un moment elle retrouve la force du soldat pour exprimer sa colère, elle sortira brisée de cette nuit en enfer. Elle a échoué dans sa mission. Elle avait foi en le bien. C'est le mal qui l'emporte.

Face à l'immense talent de Myriam BOYER 4 jeunes au talents prometteurs. François DEBLOCK révèle un VOLODIA d'une perversité machiavélique. Lui n'a rien à craindre. Sa place à l'université est assurée. Il n'est là que par charité, pour aider ses amis. Il se révèle un chef tyranique qui ira jusqu'au simulacre de viol sur l'une de ses amies pour faire pression sur le professeur. Le comédien a commencé le théâtre à 11 ans...avec Jean BELLORINI et a participé à PAROLES GELÉES, Molière 2014 du Meilleur Spectacle et du Meilleur Metteur en Scène. Il a reçu le Prix Beaumarchais et été nommé pour le Molière de la Révélation 2014. Un talent à suivre.
Jeanne RUFF donne à LIALIA toute la fraîcheur de sa jeunesse. Victime parce que femme elle l'est aussi parce que issue d'un milieu pauvre, parce qu'elle a le côté fleur bleue des adolescentes, et qu'elle est amoureuse de PACHA. Gauthier BATTOUE est un jeune intellectuel grande gueule, que l'on sent rapidement assez médiocre, et qui se révélera être de la plus grande des lâchetés. Enfin Julien CRAMPON donne vie à VITIA, l'idiot de la bande, le bon bougre, celui qui sert de "caution morale" de ces enfants bourgeois de fait ou en puissance puisque c'est pour qui est le plus en danger qu'ils sont venus ce soir, tandis qu'il sombre tranquillement dans son alcoolisme.

La mise en scène de Didier LONG est rythmée, efficace. La pièce est construite comme un thriller. Le décor joue sur les lignes de fractures pour donner à l'action la possibilité de s'exprimer simultanément en plusieurs lieux de l’appartement exiguë. L'utilisation judicieuse de la vidéo crée une scène de destruction assez irréelle, comme dans un temps suspendu et ralenti.


CHERE ELENA

En bref : une des première grosses claques de la rentrée théâtrale. Chère Elena est un coup de poing salutaire, un spectacle qui donne à penser tant il nous dérange, sans oublier qu'il nous rempli d'émotions. À voir sans hésitation aucune. Un propos fort porté par Myriam BOYER entourée de 4 talentueux comédiens en devenir.

C'EST OU ? C'EST QUAND ?
75 Boulevard du Montparnasse
Métro : Montparnasse Bievenüe (sortie 5)
Depuis le 2 septembre 2014
Du mardi au samedi à 21h - Matinée à 15h le dimanche


CHALLENGE THEATRE 2014 - Lecture - Spectacle / Le Blog d'Eimelle

Vu le 4 septembre 2014 - Poche Montparnasse

dimanche 7 septembre 2014

LES ELANS NE SONT PAS TOUJOURS DES ANIMAUX FACILES

ÉLANCEZ VOUS DANS UN JAM EUPHORISANT

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TROIS FOUS CHANTANTS

C'est en entonnant CHANSON D'AUTOMNE de Charles TRENET que ces trois là entament le show pour nous offrir un spectacle fou fou fou dont on ressort plein d'énergie, avec une  folle envie de chanter et de faire la fête.


C'est un OTNI que ce spectacle qui, à juste titre, affiche complet quasiment tous les soirs. OTNI pour Objet Théâtral Non Identifié. Ce n'est pas tout à fait du théâtre et pas tout à fait non plus un concert. Un spectacle déjanté qui alterne chansons et moments de jeu théâtral.

Ils sont trois, réunis dans ce qui pourrait être un salon. Costume, cravate et vouvoiement de rigueur. Trois amis qui échangent sur tout et surtout sur rien, tout en descendant consciencieusement chacun sa bouteille de whisky, une ambiance jazzy qui évoque la complicité des bons copains et la l'amitié studieuse des musiciens qui répètent. 


UN UNIVERS DÉJANTÉ

On y parle de Verlaine que l'un dit avoir croisé la nuit précédente, d'une voisine rousse, d'un bout d'arc-en-ciel dont ont veut se débarrasser, d'un prototype moitié homme-moitié femme. Un spectacle où la musique sert de fil rouge. Un piano, une guitare (pour gaucher), une valise-contrebasse et trois formidables acteurs-chanteurs-musiciens. Sans oublier la poésie avec une danse des mains d'une très grande tendresse et incroyable de dextérité.

Les dialogues s'enchaînent plein d'esprit et ne sont pas sans rappeler l'univers absurde des "Diablogues" de Dubillard. Une écriture ciselée, minutieuse, qui ne manque pas de piquant. Des rythmes variés, de GERSHWIN à NOUGARO en passant par COCHRAN et du chant à cappella.

Que dire si ce n'est que ce spectacle est en tous points remarquable. Les trois voix sont complémentaires. Emmanuel QUATRA a été remarqué récemment dans "Avenue Q" et "Tout Offenbach ou presque". Pascal NEYRON a fait partie de l'aventure "La bande du Tabou" créé au théâtre 13. Quant à Benoit URBAIN il a récemment assuré la direction artistique et les arrangements du Cabaret Boris Vian et du Cabaret Brassens au Studio Théâtre de la Comédie Française. Trois talents réunis sous la direction de Laurent SERRANO, metteur en scène éclectique dont les talents se sont exprimés du théâtre à l'opéra en passant par la comédie musicale et le spectacle jeune public. Une mise en scène millimétrée mais pas figée.

"Le choix des musiques et chansons que nous avons fait ensemble au cours de l'élaboration du spectacle n'a été guidé que par le plaisir" dit Laurent SERRANO dans le dossier de presse. Et ce plaisir que l'équipe a eu à construire et interpréter ce spectacle se ressent tout au long de la soirée. Trois rappels ne sont pas assez. Le public en redemande encore et encore. 

En bref : une de ces pépites estivales qui font souffler un vent de fraîcheur sur le monde du spectacle vivant. A ne manquer sous aucun prétexte.

C'EST OU ? C'EST QUAND ?

53 Rue Notre Dame des Champs 75006 Paris
Du 24/08/16 au 06/11/16 - 
Du mardi au samedi 21h  - Dimanche 19h - Durée : 1h20




Vu le 28 Août 2014 au Lucernaire
Mise à jour du 31/08/16

Photo : Compagnie Laurent Serrano

samedi 6 septembre 2014

LES FIANCES DE LOCHES

LES FIANCES ENCHANTENT LE PUBLIC

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OH GAI ! AU GAI ! MARIONS NOUS !

Si vous me lisez depuis un peu de temps vous savez que FEYDEAU et LABICHE ne sont pas ma tasse de thé. Mais comme je suis curieuse et que je ne demande qu'à être convaincue je ne pouvais résister à l'envie de me rendre au Théâtre du PALAIS ROYAL et répondre à l'appel des FIANCES DE LOCHES. Car depuis le début de l'été même les réfractaires au genre multiplient les commentaires élogieux. Alors comme ce n'est plus à l'affiche que jusqu'au 6 septembre prochain je m'empresse de rejoindre l'avis général pour vous dire tout le bien que je pense de ce spectacle.

Dès que le rideau se lève et que la troupe entonne les premières strophes nous sommes plongés dans l'ambiance des grandes heures de FEYDEAU . Nous sommes dans un bureau de placement de domestique et le ton est donné tant dans le rythme que dans les bons mots du texte. Par un concours de circonstance comme seul le vaudeville sait en créer, les lochais vont confondre agence de placement de domestique et agence matrimoniale.

Les personnages et les quiproquos se mettent en place et ces fiancés venus de la province se trouver un conjoint à Paris prend le public par le cœur pour l'emporte dans son tourbillon de rebondissements. La joyeuse troupe ne se ménage pas. Les effets comiques font mouches à tous les coups et la salle rit à l'unisson tout au long du spectacle, comme lors de la danse des lochais.

UNE AMBIANCE TRÈS RÉUSSIE


Les éléments de décors sont judicieusement utilisés pour créer les différentes scènes de ce Paris bourgeois : un bureau de placement, l'entre-chambre d'un appartement cossu, une salle de soin d'hôpital psychiatrique. Ils permettent aussi de jouer avec la profondeur de la scène. Des voiles tantôt opaques, tantôt transparents laissent à voir ou deviner les trois musiciens qui jouent en direct ou un chœur de femme répondant aux personnages évoluant sur la scène.

Il faut saluer le talent de comédiens et de chanteur de tous et toutes. Les tessitures se répondent et se complètent, participant à la construction des personnages caricaturaux. L'ensemble est d'une grande qualité de jeux et de chants. C'est drôle, remarquablement adapté, un pur plaisir.

Tous les codes du vaudeville sont présents et cette adaptation en comédie musicale permet de voir l'oeuvre de FEYDEAU autrement, d'une façon originale et extraordinairement distrayante.

En bref : plus que quelques heures pour courir applaudir ce joyeux spectacle qui réussi à concilier avec talent vaudeville et comédie musicale. Un succès estival amplement mérité. Un spectacle qui distribue du bonheur et de la joie et pour lequel on espère des prolongations ou une reprise afin de le partager avec le plus grand nombre.

C'EST OU ? C'EST QUAND ?
Après deux saisons de succès reprise pour 30 dates
Théâtre de la Michodière
4 bis rue de la Michodière 75002 Paris
Du 3 décembre 2016 au 8 janvier 2017
du mardi au samedi à 20h30 - dimanche 16h00



Vu le 2 septembre 2014 - Théâtre du Palais Royal
Mise à jour du 11/12/2016