ÉMOTION ET RECONSTRUCTION FAMILIALE
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Pour son retour sur scène Julie Gayet se glisse dans la peau d'une mère de famille qui tente de survivre au décès accidentel de son enfant. Une pièce qui aborde avec délicatesse un sujet douloureux, portés par 5 comédiens en parfaite osmose. Une émotion intense.
LORSQUE L'ENFANT DISPARAÎT
Backy et Howard ont perdu leur fils il y a huit mois. Depuis chacun tente à sa façon de surmonter ce drame qui touche toute la famille. Alors que Becky fait le tri des affaires pour les donner, sa jeune sœur lui fait part de sa grossesse. Comment vivre ce bonheur sans heurter la sensibilité de celle dont elle est si proche. Comment ne pas réagir aux paroles maladroites de leur mère ? Comment continuer à vivre en couple quand cette douleur créé un tel fossé ? Comment accueillir cet adolescent qui conduisait cette voiture maudite ?
Le texte de David Lindsay-Abaire aborde avec beaucoup de délicatesse et la dose de légèreté que les auteurs américains savent si bien distiller, un sujet douloureux. Il décrit avec subtilité le difficile chemin de chaque membre de cette famille vers la résilience, cette longue route parsemée de souvenirs, de rires et de larmes, de sentiments ambivalents qui les mènera à la reconstruction individuelle et collective.
UNE TROUPE EN PARFAITE OSMOSE
Pour son retour sur scène Julie Gayet est Becky. Celle qui semble la plus fragile se révèle d'une grande force dans ce parcours. L'interprétation sensible et toute en retenue en fait un personnage extrêmement touchant, tout en résilience et compassion. Elle nous offre des moments très forts, intenses en émotion.
Face à elle Patrick Catalifo est tout aussi émouvant. Il donne à Howard toute la fragilité du père anéanti par le drame. Lui que l'on croit si fort au début va petit à petit laisser paraître sa douleur, tout aussi intense que celle de son épouse, rendant leurs retrouvailles poignantes.
Autour du couple trois personnages tout aussi attachants et bouleversants. Il y a Lolita Chammah dans le rôle de cette jeune sœur qui n'est qu'énergie et espoir avec cette nouvelle vie qui croit en elle. Elle ne demande qu'à savourer ce bonheur tout neuf et pourtant si difficile à vivre face au cauchemar éveillé que vit sa soeur dont elle est si proche. Christiane Cohendy est une mère dont le chagrin s'exprime avec maladresse, rendant difficile la communication avec son aînée. Sur ces trois femmes plane l'ombre du fils et frère, traumatisme dont la mère ne s'est toujours pas remise. La scène de réconciliation entre mère et fille est particulièrement bouleversante. Et puis il y a Ronan Prévot qui campe avec aplomb un adolescent qui essaie de vivre avec sa culpabilité tout en tentant de garder l'innocence de son jeune âge. Un rôle complexe.
La mise en scène de Claudia Stavisky est fluide, alternant mouvement et temps calme, en phase avec le texte qui parsème de moments d'humour et de légèreté le douloureux chemin de cette famille. Parce que la vie c'est cela : des rires et des larmes, des espaces-temps où l'on oublie le quotidien, des univers parallèles qui permettent de traverser les moments douloureux . Le décor se fait écho des souvenirs et permet une utilisation sobre et intelligente de la vidéo.
En bref : un très beau et très intense moment de théâtre. Un sujet douloureux traité avec délicatesse. Un quintet de comédiens dont la symbiose culmine avec le jeu délicat et sensible de Julie Gayet. Un spectacle qui touche au plus profond.
Rabbit hole, univers parrallèles, de David Lindsay-Abaire, adaptation de Marc Lesage, mis en scène par Claudiaa Stavisky, avec Patrick Catalifo, Lolita Chammah, Christiane Cohendy, Julie Gayet et Renan Prévot
4 Rue Monsigny 75002 Paris
Du 19/02 au 31/03/2019
du mardi au samedi 21h - dimanche 15h
Vu février 2019 - Théâtre des Bouffes parisiens
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