dimanche 28 janvier 2018

LE LIVRE DE MA MERE

ODE A TOUTES LES MÈRES
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En 1954 Albert Cohen écrit une longue lettre à sa défunte mère. 64 ans plus tard Patrick Timsit dit ces mots plein d'amour et de nostalgie. Un seul en scène émouvant à voir et écouter dans le beau cadre du théâtre de l'Atelier.

UN AMOUR INCONDITIONNEL

Peu de livres traversent le temps comme "Le livre de ma mère" d'Albert Cohen. Dans une longue lettre adressée à sa mère défunte il décrit une femme ordinaire et exceptionnelle, une relation fusionnelle avec son fils unique, un amour filial intense et réciproque, mais aussi la culpabilité de cet enfant devenu homme qui ne se pardonne pas de n'avoir pas assez pris soin de cette femme qui a rempli sa vie.

1900. Elle avait débarqué à Marseille avec mari et fils, fuyant Corfou et les pogroms. Dès lors elle n'a plus que son fils comme univers, et lui n'a plus que sa mère comme lien social. Le théâtre dominical, les scènes de la vie quotidienne, c'est un amour fusionnel qui est décrit, avec toute la nostalgie d'une époque révolue, les souvenirs d'une enfance heureuse (vidéo de scènes de plages, de restaurant). Albert Cohen fait le portrait d'une mère juive esseulée, ultra-protectrice de son fils unique (ce qui sera certainement cause de son départ pour Genève pour y faire ses études), aimante et soucieuse du bonheur de ce fils, de son bien-être physique et affectif, qui jamais ne se plaindra de son sort d'exilée ni de l'éloignement de celui qui est pour elle source de tant de bonheur préférant savourer les visites qu'elle lui fait en Suisse.

"Mon enfance est morte en même temps que toi [ ] J'ai été un enfant, je ne le suis plus et je n'en reviens pas".

NOSTALGIE ET CULPABILITÉ

Cette déclaration d'amour d'un fils à sa mère n'est pas qu'un portrait idyllique. C'est aussi le regard contrit qu'un fils jette en arrière sur sa relation passée avec celle qui l'a aimé d'une manière aussi inconditionnelle. Dans ce flot d'amour et de nostalgie se mêle la culpabilité du fils qui réalise à la disparition de l'être aimé qu'il n'a pas toujours été juste avec elle, qu'il n'a pas su lui rendre tout cet amour dont elle l'a enveloppé sans rien demander en retour.

Albert Cohen écrivit la version finale du "Livre de ma mère" en 1954. Il s'appuya sur les 4 textes (chant de mort I - II - III - IV publiés à Londres entre  juin 1944 et mai 1945, quelques mois après le décès survenu en janvier 1944.

Sur la scène du théâtre de l'Atelier Patrick Timsit donne à ses mots toute leur chaleur, leur tendresse, leur humanité. Il dit ce texte avec beaucoup de retenue, d'émotion sincère. Avec humilité il donne corps à cette lettre d'amour qui se transforme en ode à toutes les mères, faisant prendre conscience ou rappelant à chaque spectateur que si "les fils ne savent pas que leurs mères sont mortelles" elles ne sont pas les seules et qu'il faut savoir profiter des ceux que l'on aime tant qu'il en est encore temps.

En bref : Dans un seul en scène sobre et émouvant Patrick Timsit porte avec humilité et émotion les paroles humanistes d'Albert Cohen. Une lettre d'amour à une mère qui se transforme en ode à toutes les mères. Une émotion intense.

"Amour de nos mères à nul autre pareil"
Albert Cohen


Crédit photo @Pascal Victor / ArtComPress
Vu en janvier 2018 au Théâtre de l'Atelier à Paris

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