mardi 6 juin 2017

ANGELUS NOVUS

UN ANTIFAUST PAS CONVAINCANT
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Pour sa nouvelle création Sylvain CREUZEVAULT s'attaque au mythe de Faust. Mettant en scène trois scientifiques qui affrontent leurs démons intérieurs il présente un spectacle foisonnant mais brouillon qui perd le spectateur par manque de clarté du propos et du traitement. Dommage.

TROIS SCIENTIFIQUES EN QUÊTE AUTHENTICITÉ

Tout commence dans un laboratoire miteux où une souris vient enfin, au bout de 4 ans de recherches, de valider une hypothèse scientifique. Pendant ce temps de l'autre côté du plateau Théodore, grand chef d'orchestre ne cesse de s’énerver contre son meilleur ami qui n'est pas venu à son grand concert de la veille tandis que son épouse Marguerite aimerait bien qu'il lui accorde plus d'attention ne serait-ce que pour le Prix Nobel qu'elle vient de recevoir. Plus tard elle déraille complètement pendant une conférence de presse, et tandis que Théodore devient Président elle se lance dans la contestation avant de prendre la fuite.

La suite des aventures rocambolesques de nos trois héros est bien trop confuse pour pouvoir résumer la ligne directrice d'ANGELUS NOVUS. Confrontés à leurs démons intérieurs nos trois scientifiques vont choisir de ne pas sombrer dans la complaisance pour rester / devenir eux-mêmes. Contrairement à Faust ils ne signeront pas le pacte qui les ferait devenir ce qu'ils ne sont pas.

BROUILLON ET OPAQUE

Enfin c'est ce que dit la note d'intention du metteur en scène. La réalisation s'avère bien plus laborieuse. Les personnages sont ballottés entre décembre 2016 et avril 2017. Outre les voyages dans le temps ils sont aussi confrontés à leurs doubles plus ou moins bienveillants. Entre fantasme et réalité le spectateur est vite perdu et le public est clairsemé à la reprise après l'entracte.

La deuxième partie nous emporte dans un opéra d'une noirceur et d'une opacité qui contraste avec la folie et l'humour de la première partie. Dominé par un élan de création bouillonnant et bordélique (il faut bien le dire), ANGELUS NOVUS, malgré quelques fulgurances, gâche le talent de ses comédiens. Ils sont le point positif de ce spectacle. L'énergie, l'enthousiasme et la sincérité de la troupe réussit l'exploit de nous tenir éveillé par l'excellence de leur jeu malgré un propos qui ne s'éclaircit pas au fur et à mesure du déroulé du spectacle.

Si Sylvain CREUZEVAULT s'interroge sur la place de la science dans une société de finance et de marchandisation, son propos manque de clarté. Certes je n'attends pas du théâtre qu'il me serve sur un plateau des réponses toutes faites à des problématiques plus ou moins complexes, mais quand il ne me distrait pas il participe à enrichir ma réflexion. J'avais très envie de me laisser porter par l'univers critique, sarcastique et bourré d'humour du dramaturge de NOTRE TERREUR qui avait ébloui la critique. Hélas, une écriture et une mise en oeuvre trop hermétiques et trop confuse ne m'ont pas permis d'adhérer à ce spectacle.

En bref : a vouloir trop démontrer et trop partir dans le cinquantième degré Sylvain CREUZEVAULT se perd dans les lacets brouillons de son anti-faust. Dommage que le talent incontestable de ses comédiens soit ainsi gâché.

C'EST OU ? C'EST QUAND ?
CDN  - Domaine de Grammond - 34000 MONTPELLIER
Les 2-3 et 4 juin 2017


ANGELUS NOVUS mis en scène par Sylvain Creuzevault, avec Antoine Cagarra, Eric Charron, Pierre Devérines, Evelyne Didi, Lionel Dray, Servane Ducorps, Michèle Goddet, Arthur Igual, Frédéric Noaille, Amandine Pudlo, Alysée Soudet
Opera Kind des Faust : Musique originale de Pierre-Yves Macé, avec Juliette de Massy (soprano) Laurent Bourdeaux (baryton basse) Léo-Antonin Lutinier (contre-ténor) Vincent Lièvrfe-Picard (ténor) Naaman Sluchin (violon) Barbara Giepner (alto) Maitane Sebastian (violoncelle)


Crédit photo @ Marie Clauzade 

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