DEUX HOMMES. TROIS MOTS.
UNE JOUTE VERBALE DE HAUTE VOLTIGE.
IL ÉTAIT UNE FOIS TROIS PETITS MOTS
Deux hommes, amis de longue date. Trois syllabes prononcées par l'un d'eux. Une amitié d'enfance remise en question, à la limite de la rupture, pour une intonation, une interprétation, une sensibilité. Une explication est nécessaire. Pourquoi a-t-il employé CETTE expression ? Pourquoi l'avoir dite sur CE ton ?
De ce "c'est bien....ça" prononcé par l'un c'est toute la colonne vertébrale de leur relation qui est remise en cause, menaçant de s'effriter. Cette amitié a-t-elle jamais existé ? N'était-elle qu'un leurre ? Quelle était la part de la sincérité et celle de l'hypocrisie tout au long de ces années ?
De ces trois petits mots c'est la relation de l'un à l'autre, des uns aux autres, un des piliers de la société qui semble remis en question.
Au travers ces trois mots l'auteur Nathalie SARRAUTE nous rappelle à son goût pour la précision, son exigence pour la langue française. Car c'est le but de ce texte ciselé, précis, fin : nous interpeller sur les mots qui nous semblent anodins, que nous prononçons à la légère, sans vraiment y penser. Et si on décidait de s'y arrêter ? S'il fallait faire une mise au point sur ce que deux amis se disent vraiment ? De l'ergotage stérile seriez-vous tenté de penser !
C'est là que se trouve toute la force du texte de Nathalie SARRAUTE : au travers d'une explication mouvementée entre ces deux hommes qui se sont si longtemps côtoyés, c'est une volonté de l'auteure de donner un sens à des propos, des échanges, des mots affadis soit par un usage trop fréquent, soit par une forme de détachement. Une minutieuse analyse de la langue et des comportements.
FACE A FACE INTENSE
Léonie SIMAGA, à peine sortie de la Comédie Française dont elle était sociétaire, met en scène avec sobriété le texte de Nathalie Sarraute. Dans un décor minimaliste un banc évoque un intérieur d'une extrême simplicité. C'est le texte qui prime, la sobriété des lieux, la blancheur des lumières, mettent en avant l'intensité dramatique de cette situation, qui par ailleurs pourrait sembler si banale et si désuète.
C'est à Nicolas BRIANCON et à Nicolas VAUDE qu'elle a confié la tâche de donner vie à cette confrontation. Tandis que Nicolas BRIANCON est plutôt calme, serein, sûr de lui, et sûr de n'avoir jamais fait quoi que ce soit qui vise à moquer son ami, ni à le dénigrer, Nicolas VAUDE est tendu, fébrile, parfois un peu extatique. Dans ce quasi huis-clos perturbé par deux apparitions des voisins, les rôles s'inversent parfois dans un rapport dominant-dominé. On frôle parfois l'absurde dans ces logiques par toujours rationnelles.
Les deux comédiens dont le talent n'est plus à prouver sont fascinant par la puissance de leur interprétation. Ils servent avec précision un texte exigeant, faisant ressentir chaque nuance, chaque ponctuation, chaque code de langage susceptible de modifier les suites d'une action ou d'une situation selon la perception que l'un ou l'autre aura de ce qui est dit. Jusqu'à la question sous-jacente : quelle image renvoyons-nous à l'autre ?
En bref : Nicolas BRIANCON et Nicolas VAUDE, deux comédiens magistraux qui rendent hommage au très beau texte de Nathalie SARRAUTE par une remarquable interprétation, sous la direction fine et précise de Léonie SIMAGA. Un bel échange à ne pas manquer.
POUR UN OUI OU POUR UN NON, de Nathalie Sarraute, mis en scène par Léonie Simaga, avec Nicolas Briançon, Nicolas Vaude, Roxana Carrara.
C'EST OU ? C'EST QUAND ?
Poche Montparnasse
75 Boulevard du Montparnasse 75006 Paris
Jusqu'au 19 mars 2017
Du mardi au samedi 19h - dimanche 17h30
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