L'ANGE PUNK NOIR OU BLANC DE LA TERREUR
****
I'M A DOG I'M A TOAD I'M A HEDGEHOG, I'M A MONSTER
A la fin de cet Henry VI de légende dont Thomas JOLLY nous a fait cadeau tout au long de la saison 2014/2015, un ange noir dressait sa sombre silhouette, celle du sinistre Richard.
Dès la première scène de RICHARD III il surgit des entrailles de la scène ou de la terre tel l'ange de la terreur. Rebut de l'humanité, être imparfait qui se venge de l'affront que lui a fait la nature. Ne nous y trompons pas : c'est une tragédie que nous présente Shakespeare avec RICHARD III. Le destin sombre d'un enfant rejeté de tous à cause de sa difformité, avide de pouvoir pour écraser ceux qui toute sa vie l'ont méprisé, rejeté, ignoré.
OMBRES ET LUMIERES
La scénographie surprend ceux qui on vu Henri VI peut-être parce qu'elle en prend le contre-pied. Richard III est un personnage sombre. La scène est noire, souvent vide de décors si ce n'est les échafaudages / praticables que l'on avait vus dans Henri VI et moins nombreux ici.

La mise en scène reste rythmée même si quelques changements de décors sur la fin de la première partie (avancée et recul latéral des rideaux) alourdissent la scène.

Face à un public parisien très critique et très demandeur l'aspect punk rock de la fin de la première partie, le couronnement du roi, ne fonctionne pas et le public de l'Odéon ne rentre pas dans le jeu que le jeune dramaturge veut lui imposer. Dommage.
QUAND GAGNE L'EMOTION
La deuxième partie gagne en intensité dramatique. Oubliant les effets comiques elle permet aux personnages et notamment au rôle titre de prendre de l'ampleur. Les victimes passées réapparaissent. Sous forme de tableau officiel de famille, tels des anges protecteurs ou des menaces cauchemardesques pour faire trembler les armées. Sans oublier l'émotion avec une émouvante scène où les trois reines pleurent leurs maris, leurs enfants, chacune abordant son chagrin à sa manière mais dans une certaine communion. Ainsi la prenante mise en scène de la veille de la bataille avec les fantômes de ses victimes qui encouragent Brighton et se transforment en cauchemar pour Richard.

Car cela reste la grande force de Thomas JOLLY : réunir un texte classique et ardu avec une mise en scène moderne qui séduit les foules, y compris les plus jeunes. "Populiste" l'ont qualifié certains, avec tout ce que cela a de péjoratif. Je réponds "populaire" et "moderne", une qualité, une énergie qui fait venir un public jeune dans les salles de théâtre, qui fait qu'ils ne seront pas dégoûtés mais séduits et qu'ils reviendront, avec encore plus d'exigence. Il se forgeront leur histoire, leur goût, leur propre relation au théâtre, mieux certainement qu'avec d'autres metteurs en scène plus élitiste et donc plus restrictifs.
Merci Monsieur Thomas JOLLY pour votre folie, votre énergie, votre jeunesse, votre fougue, votre créativité, votre parcours qui sort des sentiers battus et qui secoue un théâtre parfois trop établi. Bravo pour le magnifique et enthousiasmant travail de votre troupe, la Picola Familia. Bravo pour votre générosité, pour votre envie de partager ces aventures avec votre public.
En bref : prenant le contre-pied de Henri VI Thomas JOLLY nous offre une version punk-rock de Richard III, enfant tourmenté qui prend sa vengeance sur la nature et sur les hommes. Un spectacle flamboyant par la qualité de son interprétation et une esthétique éblouissante.
C'EST OU ? C'EST QUAND ?
Odéon Théâtre de l'Europe
Place de l'Odéon - Paris
Jusqu'au 13 février 2016 - 19h
Durée : 4h30 (mais on ne les voit pas passer)
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire