RÉFLEXION SUR NOS LIENS A L’ÈRE DU NUMÉRIQUE
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Vincent est un travaillomane. Il est tellement immergé dans son travail, son ordinateur, ses téléphones, qu'il ne s'aperçoit même pas que sa femme le quitte, lasse de parler à une ombre. Pour gérer ses liens avec le reste de l'humanité il en vient à faire appel à Karine, consultante en gestion des réseaux sociaux. Entre ces deux solitaires qui ne communiquent avec le reste du monde que via les outils numériques va se tisser une relation qui les amènera à repenser leur relation aux autres.
« Je te parle de ce lien qu'il y a entre nous. Tu ne le vois pas, tu ne peux le sentir, le toucher, ou l'entendre.
Il n'apporte aucun goût dans ta bouche. Mais il est là, entre l'autre et toi, il vous éclaire et vous lie.
Et jusqu'à aujourd'hui, il nous appartenait encore »
NOS RELATIONS DANS LE MONDE 2.0
Passionné de numérique Orah de Mortcie s'est appuyé sur cette passion pour écrire une pièce pleine de sensibilité. Il nous interpelle sur notre manière de gérer nos relations à une époque où les outils numérique et le virtuel semblent prendre le pas sur les relations réelles. L'histoire de Vincent et sa relation avec Karine évolue avec fluidité, logique et cohérence.
Le texte trouve écho en chacun d'entre nous. Les répliques font mouche. Comme Vincent et Karine on en vient à s'interroger, avec comme une envie de faire un arrêt sur image pour se regarder et continuer la réflexion. "Parce que le travail c'est pas la vraie vie ?" demande Vincent. Et quand il la questionne sur son addiction à ses doubles virtuels Karine répond "C'est mon existence corporelle qui entravait mon existence numérique". Comme un écho à Michel FOUCAULT quand il écrivait "mon corps, c'est le lieu sans recours auquel je suis condamné".
Face à cette jeune femme au langage direct, à l'esprit rebelle et à la liberté féministe Vincent est l'archétype de ces drogués du travail qui ont perdu tout contact avec le reste de l'humanité, ces cadres du tertiaires qui ouvrent leur PC à peine installés dans le métro pour continuer à taper des lignes de codes tout en parlant par téléphone au collègue quitté quelques minutes plus tôt. Il en est à un point où il ne prend même plus le temps de laisser parler son coeur, où il semble anesthésié et fermé à tout sentiment qui pourrait perturber son travail. Et n'allez surtout pas le confondre avec un geek, là n'est pas le propos.
Avec tendresse, poésie, humour et subtilité "LE PROCHAIN TRAIN' nous amène à nous interroger sur notre relation aux autres, notre gestion du temps, à la définition de nos priorités
UN UNIVERS GRAPHIQUE ET SONORE TRÈS ABOUTI
Outre la justesse du jeu de Stéphane DUGUIN et de Jeanne COUPPIE dont on perçoit toute la complicité née de plusieurs années de travail en commun, la mise en scène fluide s'appuie sur une scénographie simple : un petit appartement avec sont coin cuisine réduit à sa fonction basique, un bureau avec deux chaises et dans le fond un porte-manteau, comme un rappel qu'il existe un monde en dehors de cet appartement et en dehors du travail. Karine ne s'autorise-t-elle pas un long week-end romantique avec l'une de ses rencontres virtuelles ?
Passé les premières minutes qui installent les personnages on se laisse séduire par la personnalité un peu ours sauvage de Vincent et l'énergie directe et moderne de Karine.
Ce travail très abouti de la Compagnie des Bandits de Grand Moulin est couronné par une mise en lumière particulièrement étudiée, et bercée par l'univers musical créé par Cédric le Guillerm, dont on peut acheter le CD à la fin de la représentation (ainsi que le texte) et dont vous pouvez découvrir des extraits sur le site internet de la compagnie en cliquant ICI
En bref : une comédie très aboutie, un texte riche, drôle et subtil qui nous interpelle, deux comédiens très attachants, un univers musical séduisant : autant de bonnes raison d'embarquer à bord du PROCHAIN TRAIN. Ne le rater pas !
C'EST OU ? C'EST QUAND ?
Théâtre
Notre Dame
13/17
Rue du Collège d'Annecy - Avignon
Du
5 au 27 juillet 2014 - 14h35 - Durée : 1h30
Photos : Compagnie des Bandits de Grand Moulin
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