"VIVRE C'EST ATTENDRE"
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DE LA SOLITUDE...
"Une femme attend un homme qu'elle aime, qui n'est maintenant plus là. Elle cherche une issue à son absence, pour continuer à vivre, malgré tout. Les moments passés de leur existence se mettent à revivre, presque semblables à ce qu'ils ont été. Qu'est-il advenu de lui ? Est-il mort, est-il parti pour un autre amour ?"
PREMIERE PIECE DE JON FOSSE
Le
rideau se lève sur un appartement moderne. Le décor est épuré : des murs
unis, quelques objets posés sur une ornière du mur du fond, une fenêtre qui
éclaire la pièce, au centre un canapé gris. Un rire glacial éclate et secoue la
femme assise. Son rire grossit puis se
fait à nouveau plus doux. Son regard erre du sol au plafond, de gauche à
droite. « Non ». Elle se lève, va vers la fenêtre, « Non, ça ne
marchera pas ».
Ainsi
commence cette première pièce écrite par Jon FOSSE, écrivain norvégien
contemporain de plus en plus joué sur les scènes françaises (« Le fils »
mis en scène par Jacques LASSALE au théâtre de la Madeleine en 2012, « Je
suis le vent » et « Rêves d’automne » par Patrice CHEREAU en
2010 et 2011).
DES INDIVIDUS NORMAUX
De
cette femme qui attend nous ne saurons rien. Qui est-elle ? Qui est
celui qu’elle espère ? Quelle a été leur histoire ? Pourquoi est-il
parti ? Que s’est-il passé cette nuit-là ? Est-il toujours vivant ?
L’a-t-il quittée pour une plus jeune ? Depuis combien de temps l’attend-t-elle ? Autant de questions qui restent sans réponse. Jon FOSSE laisse au spectateur le choix de son interprétation, selon son vécu, son humeur du moment, son histoire.
Car l'histoire de cette femme est universelle. C'est celle de l'humain confronté à l'absence de l'autre. Elle sait qu'il n'est plus là, qu'il ne reviendra jamais. Elle sait que ces scènes d'hallucinations, dans lesquelles elle revit le passé, ne sont que l'expression de son désir exacerbé de la présence de l'autre. Mais si elle refuse de les laisser partir, si elle refuse d'arrêter de l'attendre n'est-ce pas par peur qu'il disparaisse définitivement de sa vie et de son esprit ?
Alternant prise de conscience et rêve éveillé, à la limite de la folie, elle lutte constamment entre la nécessité de continuer à vivre une vie normale, d'avancer et le besoin d'attendre, d'évoquer, de parler à celui qui lui est si vital, la peur de le perdre à tout jamais si elle devait perdre le souvenir de l'absent, de leur amour. Alors elle se raccroche à ses objets "Et je suis ici avec mes objets, Et je me sens bien, Moi et mes objets".
Ludmila Mikaël et Marc Paquien pour "Et jamais nous ne serons séparés" de Jon Fosse.
MAJESTUEUSE LUDMILA
Sur un texte extrêmement difficile et exigeant, fait de répétitions, d'aller-retours, Ludmila MIKAEL est magnifique. Toute en sensibilité et en subtilité, elle est constamment sur le fil, passant d'une émotion à l'autre, parfois dans les extrêmes, bouleversante dans ses hésitations, ses espoirs, ses doutes et ses certitudes, sans jamais tomber dans ce qui pourrait être une caricature de la folie. Son jeu irradie toute la pièce.
A ses côtés Patrick CATALIFO et Agathe DRONNE sont plus que des faire-valoir. Patrick CATALIFO est un fantôme troublant, jusqu'à son costume gris de la première partie qui le fait se fondre littéralement dans le canapé. Son image rôde tel le souvenir de ce qui fut cet absent.
Agathe DRONNE apporte un air de fraîcheur, de jeunesse. Est-elle le fantôme de la femme ou bien l'amante de l'absent ?
En bref : un texte beau mais difficile qui pourrait rebuter certains, mais un magnifique retour sur les planches pour Ludmila MIKAEL qui justifie à elle seule le déplacement.
Pour en savoir plus :
Mise ne scène: Marc Paquien, à partir du 10 septembre à Paris au Théâtre de l'Œuvre.
avec Ludmila MIKAEL, Patrick CATALIFO, Agathe DRONNE
Interview de Ludmila MIKAEL sur France Inter dans Studio Théâtre de Laure ADLER le 7 septembre 2013 disponible en podcast jusqu'au 01/06/2016
C'EST OU ? C'EST QUAND ?
55 Rue de Clichy 75009 Paris - Métro Place de Clichy, Liège.
du mardi au samedi à 20h30 - matinée à 15h le dimanche
Vu le 19 septembre 2013 au Théâtre de l'Œuvre - Paris
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