UNE FAMILLE DÉLICIEUSEMENT DÉJANTÉE
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UNE LONGUE ATTENTE RÉCOMPENSÉE ?
Cela fait quelques semaines que je vous parle de "MÊME PAS VRAI", une comédie écrite par Sébastien BLANC et Nicolas POIRET, à l'affiche du Théâtre Saint Georges depuis le 25 janvier 2014. En fait depuis que j'ai eu la chance de rencontrer l'équipe de la pièce au cours d'une soirée organisée pour les blogueurs / blogueuses de théâtre, et que je suis tombée sous leur charme. Je terminais mon billet du 19/12/2013 par "Rendez-vous est pris pour ce qui promet d'être une des pièces à voir en cette rentrée de janvier 2014" (cliquez ICI pour le résumé de la pièce).
Alors je ne vous cache pas que c'est avec une petite appréhension que je prenais place dans le beau Théâtre Saint Georges pour assister à l'une des premières représentations parisiennes : et si je n'aimais pas ?
Alors c'est soulagée et heureuse que je suis sortie du théâtre. Parce que le détournement des codes du boulevard qui nous avait été annoncé par les auteurs est bien là. Parce que l'enthousiasme de l'équipe ne s'est pas émoussé. Parce le texte est drôle. Parce que le plaisir des comédiens se communique au public. Parce que "MÊME PAS VRAI" est une réussite et que j'ai aimé.
DÉTOURNEMENT DE CODES
Effectivement on pourrait croire que ça commence comme un boulevard classique : un homme (Arnaud), une femme (Mathilde), une maîtresse, un enfant et des amis. Dès les premières minutes le scénario instille le doute sur qui est qui.
Mathilde et Arnaud sont mariés depuis plus de 20 ans. L'un et l'autre utilisent le mensonge et l'affabulation comme un outil de communication pour rendre le quotidien plus supportable ou pour faire cracher la vérité à leur victime du moment, y compris leur fils chéri. Leur technique atteint des sommets dès lors qu'un nouveau venu débarque dans cette famille hors norme. Ce soir c'est Marie, la nouvelle petite amie de Bernard, ami et collègue de Mathilde, qui en fera les frais. Quand au fils Michaël, il y a longtemps qu'il a compris qu'il était inutile d'essayer de lutter contre ses parents. Mais ce soir-là il y a quelque chose de changé.
Cette famille déjantée ne sait pas où placer le curseur de l'authenticité ni écrire le mot fin d'un scénario qui va crescendo dans l'affabulation. Et plus c'est gros, plus ça marche c'est bien connu, comme la rencontre avec Marie où la torture psychologique cède la place au thriller. Rapidement les codes du genre éclatent. Les répliques fusent (gageons que certaines deviendront cultes). L'écriture est vive. Les échanges sont drôles, parfois hilarant. On rit énormément.
COMPLICITÉ ET ÉNERGIE
Raphaëline GOUPILLEAU s'en donne à cœur joie pour jouer une Mathilde fantasque, une tornade d'énergie qui balaie tout sur son passage, teste inlassablement son entourage sous le ton cruel de l'amour vache, et refuse de regarder la réalité en face. N'est-elle pas saisie de stupéfaction et d'horreur lorsque Arnaud lui dit "Si on se posait les questions tout simplement" ?
Elle entraîne dans son sillage l'ensemble des comédiens : Bruno MADINIER se glisse avec réussite dans le rôle d'Arnaud, à la fois drôle et touchant ; Anne BOUVIER (Marie) est une irrésistible psychiatre qui trouve en ses hôtes des patients plus vrais que nature ; Christophe GUYBET et Valérie ZACCOMER sont les amis et victimes consentantes du délire de Mathilde et Arnaud qui pourtant ne les épargnent pas. A la fois tampon et filtre ils savent aussi bien éviter les coups que se servir du délire de leurs amis. Quand à Thomas MAURION il s'en sort admirablement dans le rôle du fils malmené par l'amour de ses fantasques parents.
FAIRE FACE A LA RÉALITÉ OU LA FUIR ?
Mais sans vouloir faire de la psychanalyse de comptoir ce qui m'a séduit c'est que derrière la
comédie le propos se fait aussi plus profond. Pourquoi Arnaud et surtout Mathilde refusent-ils la réalité ? Sont-ils seulement
capables de se dire "je t'aime" autrement qu'à coup de poignard ou de
provocation ? Car ces deux-là s'aiment. Ils s'aiment tellement
qu'ils sont prêts à inventer n'importe quoi pour éviter à l'autre de
souffrir, quand bien même ce n'importe quoi est encore plus
insupportable que la vérité qu'il prétend cacher.
Car au fond la vie n'a-t-elle pas besoin parfois de magie ou de poussière d'étoile pour la rendre merveilleuse ? Mathilde n'a-t-elle pas raison de vouloir y mettre un peu de piment et de garder son âme d'enfant pour surmonter les épreuves de la vie, les écueils sur lesquels de nombreux couples se fracassent et refuser de sombrer dans le sérieux que la société attend des adultes et de vouloir faire fi du temps qui passe ? (Tiens cela me rappelle "Le Zèbre" d'Alexandre JARDIN).
MISE EN SCÈNE AU CORDEAU
Les beaux décors judicieusement conçus par Stéphanie JARRE permettent à l'action de naviguer de manière fluide dans l'univers familial et professionnel des protagonistes. En soignant les détails la mise en scène de Jean-Luc REVOL est la virgule ou le point qui ponctue les phrases et leur fait caisse de résonance.
Le Théâtre Saint Georges a pris le risque de miser sur deux jeunes auteurs pour cette rentrée de mi saison. Le pari est gagné et je mise sur le fait que le public répondra présent
En bref : Une réussite sur toute la ligne. Je souhaite longue vie à "MÊME PAS VRAI". La comédie de la rentrée devrait faire un carton
C'EST OU ? C'EST QUAND ?
Théâtre Saint Georges
51 Rue Saint Georges 75009 PARIS
Métro Saint Georges
A partir du 25 janvier 2014
Du mardi au samedi à 20h30 - Matinée à 17h le samedi
j'ai déjà eu l'occasion d'applaudir Raphaëline GOUPILLEAU , le reste de la distribution a l'air au diapason, voilà qui a l'air sympathique!
RépondreSupprimerBravo pour ta critique, Christine!
RépondreSupprimerJe partage tout à fait ton enthousiasme pour cette pièce!