lundi 3 février 2014

LAMPEDUSA SNOW

UNE ASCENSION MANQUÉE

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UN NAUFRAGE VERTICAL

"LAMPEDUSA SNOW" est le deuxième volet de la Trilogie du Naufrage de l'italienne Lina PROSA, débutée en 2003 avec LAMPEDUSA BEACH (voir mon article du 09/12/13 en cliquant ICI). L'auteur s'est inspirée de vraies tragédies humaines de l'immigration pour écrire ces textes militants sous forme de trois longs poèmes.
  
Mohamed a quitté l'Afrique en bateau, comme sa sœur Shauba. S'il a eut la chance et la force d'atteindre le rivage de l'ile italienne de Lampedusa, c'est à un autre univers hostile qu'il est confronté. Avec 99 autres réfugiés demandant l'asile politique, l'état italien l'envoie à 1.800m d'altitude pour attendre une éventuelle régularisation de ses papiers. Là, pendant des mois, l'africain à la peau noire de l'ébène va lutter contre le froid de la blanche neige qui s'engouffre partout. Lui dont les yeux sont habitués à l'éclat du soleil aurait bien besoin des lunettes de sa sœur Shauba pour se protéger de le réflexion crue du soleil sur le sol blanc environnant.

MANQUE D’ÉMOTION

Dans Lampedusa Beach Shauba est en constante recherche de souffle dans son interminable descente dans les eaux profondes au large de l'Italie. Elle a une histoire, un destin qui la lie à la sa terre, à sa famille, à son pays, et qui s'inscrit dans un tout. Dans Lampedusa Snow je n'ai pas retrouvé cette importance du souffle, fil tenu entre la vie et la mort, qui manque autant que l'on plonge dans les eaux profondes ou que l'on monte dans les hautes cimes vers les neiges éternelles comme on monterait vers un avenir plein d'espoir.

Ce second volet manque d'émotion. Je n'ai pas compris l'histoire de Mohamed. Pourquoi cet ingénieur en électronique qui a une formation, un travail, qui est construit pour bâtir l'avenir de son pays, se laisse-t-il convaincre de prendre ce bateau qui l'emmène vers "l'Empire". Il sait qu'à peine arrivé sur la plage, après avoir nagé les 500 derniers mètres, rescapé grâce à la force de sa jeunesse, personne de ce côté-ci ne le reconnaitra comme l'ingénieur qu'il est. Lui même reconnait qu'à bord de ce bateau il est le seul à avoir une éducation. Que va-t-il chercher au-delà de cette mer ? Pourquoi son pays et sa famille l'envoient-ils ailleurs ? Qu'espère-t-il ?

Je n'ai pas non plus ressenti la progression dans le récit qui évoque plus le conte que le poème et m'a semblé moins structuré que le premier volet. J'ai le sentiment d'être passé à côté du message que voulait faire passer l'auteur. En quête de quel avenir meilleur cet ingénieur croit-il partir ? Certes il doit chez lui travailler sous le contrôle du "gros blanc" mais croit-il qu'il aura plus de chance d'être le maître de sa vie dans un pays qui lui n'est pas en manque d'ingénieurs en électronique ? Est-ce la fuite des élites en cas de crise qui est ici mise en cause ? Peut-être une relecture du texte me permettra-t-elle de mieux comprendre.

En fait le seul passage qui m'ait vraiment marquée est l'histoire des lunettes de soleil, de leur conception à leur recyclage, passage qui fait le lien avec la Shauba du premier volet du triptyque.

  SOBRIÉTÉ DU JEU ET DE LA MISE EN SCÈNE

La scénographie et la mise en scène sont minimalistes et en ce point renforcent la cruauté et la solitude de la situation de Mohamed. Cerné par le blanc, sans les lunettes de soleil que Shauba a emporté avec elle, chichement protégé par le sweat-shirt qu'un italien a eut la bonté de donner à l'association qui recueille ces 100 immigrés, Mohamed erre et trouve la force du conteur pour inventer des destins à partir d'un emballage de bonbon trouvé au fond d'une poche.

Sans jamais tombé dans le pathos, avec la force de sa voix Bakary SANGARE rend dignité et noblesse à ces naufragés des Alpes.

En bref : malgré une belle interprétation un second volet moins puissant que le premier et qui me laisse un goût d'inachevé

C'EST OU ? C'EST QUAND ?


Théâtre du Vieux Colombier
21 Rue du Vieux Colombier 75006 PARIS
Métros Saint Sulpice, Sèvres-Babylone

Les trois volets de la trilogie du naufrage sont présentés au Théâtre du Vieux Colombier du 31 janvier 2014 au 5 février 2014.

Lampedusa Beach : 1er février à 15h - 2 février à 20h et 3 février à 19h
Lampedusa Snow : 31 janvier à 20h - 1er février à 17h - 4 février à 19h
Lampesusa Way : 1er février à 19h - 2 février à 18h - 5 février à 20h

Challenge Théâtre 2014

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