dimanche 10 mars 2019

EN ATTENDANT BOJANGLES - Le regard de Corinne - Théâtre de la Renaissance

Folie douce

Le regard de Corinne


Sans Emmanuelle et Thierry Boizet, fondateurs des éditions Finitude, nous serions  probablement passés à côté de ce beau roman.

L'auteur (Olivier Bourdeaut) nous raconte une histoire d'amour, un amour fou dont nous  devinons que l'issue ne sera pas heureuse, un amour hors norme qui refuse le conventionnel, la routine, entre Marguerite ou Hortense, selon les jours, que nous croyons juste excentrique mais au fil de l'histoire nous la découvrons bipolaire, et Georges qui s'invente, par fantaisie, des vies mais qui est conscient de leur dérive.

De cette union naîtra un garçon, témoin de leur folle passion et embarqué dans  l'aventure. C'est d'ailleurs lui qui nous raconte leur vie, qui nous entraîne dans leur intimité.

L'adaptation de Victoire Berger Perrin est fidèle au roman. Avec finesse et sensibilité, elle déroule devant nous le quotidien de ce couple atypique, rythmé par les fêtes organisées dans le grand appartement parisien ou dans le château en Espagne et par le refus absolu de contraintes (administratives, fiscales, scolaires ou autres..). Elle place au centre du spectacle ce jeune narrateur qui donne le tempo des événements, des sentiments. Il est le porteur de l'histoire de ses parents, de la gaieté et du bonheur qu'ils véhiculent mais qui peu à peu seront rattrapés par la maladie, la prise de conscience et la tristesse.

Julie Delarme, dans le rôle de Marguerite, donne de l'épaisseur au personnage. Son interprétation toute en nuance, oscille entre la force, l'énergie de cette femme capable d'embarquer sa famille dans ses lubies et la fragilité, la sensibilité lorsque commence à apparaître les premiers signes de la maladie. Elle est pétillante avec juste la pointe de folie qui la rend crédible et subtile dans sa progression vers l'irritabilité et la tristesse.

Didier Brice interprète Georges. C'est un mari fou amoureux de sa femme, charmeur, séducteur, capable de tout pour elle, à commencer par lui réserver une vie de de fantaisie, de gaieté et de danse. Il dit d'elle : "Le temps d'un cocktail, d'une danse, une femme folle et chapeautée d'ailes m'avait rendu fou d'elle en m'invitant à partager sa démence". Elle est pour lui la promesse d'une vie différente, peut être son alter ego, la maladie en moins. 

C'est aussi un père, mais il ne colle pas vraiment l'image de celui que nous pouvons nous en faire. Il est plutôt le grand frère, le complice de son fils. L'épisode rocambolesque de l'évasion de l'hôpital psychiatrique en témoigne. Ainsi, sans forcer le trait, avec beaucoup de naturel, il donne son intensité au personnage.

Quant à Victor Boulenger, il se glisse dans la peau du fils. Il nous livre là sa perception de son univers familial, avec la naïveté et la confiance en l'adulte qui caractérisent un enfant. Il interprète à merveille son rôle.

Bien que le sujet du roman soit dramatique, la joie et la fantaisie traversent de bout en bout cette pièce.

C'est une autre façon d'aborder un thème douloureux et de lui donner un peu de légèreté. A l'image du livre, la pièce est une belle réussite.

En attendant Bojangles, d'après le roman d'Olivier Bourdeaut, mise en scène Victoire Berger Perrin, avec Julie Delarme, Didier Brice et Victor Boulenger



C'EST OU ? C'EST QUAND ?
Théâtre de la Renaissance
20 Boulevard Saint Martin 75010 Paris
Du 6 février au 9 mai 2019.

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